Premiers pas
                                                                             Dans tous les cas, lorsqu'une personne ne trouve plus de réponse à ses questions existentielles et qu'elle sent le besoin de s'émanciper, ou ne trouve plus d'adéquation avec les "vérités" environnantes, elle se tourne vers son intérieur et y trouve un puissant aimant qui l'attire, relié à un fil au bout duquel elle peut voir un miroir, qui lui renvoie le reflet de ses interrogations... C'est à ce moment-là que commence les premiers pas vers la recherche spirituelle, et la religion, sous toutes ses formes, est la première réponse et le premier chemin.

Le premier ressentiment est qu'il y a quelque chose qui contrôle la vie humaine dans ses moindres phases, et ce "quelque chose" se traduit comme une voix intérieure et lucide, qu'on paternalise, que l'Homme conçoit comme un père et qui nous guide, et seul capable de justifier la trame de son existence. Alors s'établit pour l'Homme, une relation de supérieur à inférieur, d'ascendant à descendant, dont il est le réceptacle de toutes les impressions qui se manifesteront en lui pour résoudre ses interrogations. Plus l'Homme prêtera attention à cette voix intérieure qui semblera lui donner des réponses à ses interrogations, plus naîtra en lui le désir d'identifier plus concrètement cette voix. C'est ainsi qu'il frappera à la porte de la religion qui sera, véritablement, son premier pas sur le longet tortueux chemin qu'est la spiritualité...
La religion, ici exprimée, ne concerne pas seulement les structures religieuses assez répandues, mais toute ambition traditionnelle, philosophique et/ou spirituelle ayant vocation de relier l'Homme avec sa nature intérieure. C'est cela la vocation première de toute religion. Nature intérieure et non nature spirituelle. Cette nuance doit être bien comprise car la religion, sous toutes ses formes, n'élève pas l'Homme au-dessus de la morale. Dans ses premiers pas dans la religion, l'Homme ne conçoit son rapport à elle que par celui d'un inférieur à un supérieur, qui est, comme nous l'avons dit, Dieu! Mais maintenant, il commence, en plus de cela, à considérer que cette relation lui est privilégiée et exclusive. Privilégiéer et exclusive parce qu'il considère que ce qu'il vit n'est vécu par aucun autre être humain autour de lui, qu'il est le seul canal par lequel s'exprime la volonté de ce supérieur, et qu'il en est l'interprète et le gardien. C'est ainsi que naîtra la dévotion, ce sentiment qui a conduit à bien de révélations de l'étendue des mystères du cerveau humain, mais aussi à des horreurs humaines les plus inimaginables...

Le deuxième ressentiment qui vient dans l'être humain après son entrée dans la religion, est qu'il devrait désormais vouer sa vie au service de ce Dieu qui est son supérieur et qui lui a révélé - ou plutôt donné - les réponses à ses nombreux questionnements durant sa vie de tâtonements. Maintenant qu'il "sait", il lui doit tout, et c'est comme caler qu'il lui témoigne sa reconnaissance! Cependant, au fur et à mesure qu'il avance dans ce nouveau chemin qu'est la religion, il se rend compte que les questionnements qu'il avait au début, prennent du volume et deviennent de plus en plus inextricables au point qu'il commence maintenant à se demander s'il a suivi le bon chemin et s'il a écouté la bonne voix... Bien entendu, il peut s'écouler toute une vie sans jamais remettre en question les acquis de la religion et ne jurer que par elle... Comme un révéil qui nous tire de notre profond sommeil le matin, la prise de conscience que la religion est insuffisante nous parvient lorsque surgissent en nous les nombreuses incohérences d'une croyance qui est en contardiction avec la logique scientifique la plus simple de notre monde. La religion devient donc un vieux vêtement usé dont on veut se débarrasser à tout prix, et c'est ainsi que s'ouvrent, pour l'Homme, les portes de la philosophie proprement dite ou Mysticisme.


                                                                               Ce nouvel horizon qu'est le Mysticisme, lui offre la même relation que la religion, mais à une échelle plus élévée et plus intime: il devient le microcosme de Dieu, son supérieur. Et cette nouvelle "promotion", dont il s'est seul emparée, le guidera, sans qu'il en ait vraiment conscience, durant son parcours mystique où, sans que cela ne lui saute aux yeux, il fera un retour en arrière, subtil, de plusieurs siècles car, en se considérant comme microcosme du Divin au détriment des autres créatures, sa conscience se tourne en direction de l'anthropocentrisme, notion aujourd'hui déjà dépassée, comme l'était le géocentrisme.
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